Au fil de l'autre

Carnet de notes de mes explorations: filage, tissage et teintures
  

Notes sur la cuve d'indigo, via J. Liles

17.11.2023 Joie du monde de la teinture: on n'a pas fini d'apprendre. Parmi les livres que je relis régulièrement: celui de J. Liles. Qu'ai-je retenu de mes lectures du Liles, sur la cuve d'indigo?



Je suis en semaine de teintures (rendez-vous bi-annuel pour approvisionner mon stock de fils de tissage). J'ai relancé deux cuves d'indigo, l'une assez alcaline pour les cellulosiques, l'autre à la gélatine et à pH de 8.5 pour laine et soie.

Je n'arrive pas à limiter les élans à de la production simple, il faut que j'explore. Je relis les infos sur l'indigo dans le livre de J.N. Liles,   " The Art and Craft of Natural Dyeing: Traditional Recipes for Modern Use". Très sourcé, approche scientifique rigoureuse et documentée, rappels des sources historiques. On peut lire de larges extraits en ligne, mais vous gagnez tout à acheter le bouquin. Voir ma présentation.

Je note ce que je n'aurais pas indiqué dans mes précédentes notes sur l'indigo depuis quelques années.

J'ai trouvé la réponse à ma question sur la température d'eau pour l'indigo: parfois peut être bouillante, parfois doit être de maximum 60°C. Réponse: l'indigo non solubilisé supporte l'eau bouillante, c'est sous sa forme leuco-indigo, réduite, qu'il doit être chouchouté aux alentours de 50°C (60°C max').

 

Je note qu'il utilise de l'indigo synthétique et non naturel (pour son taux d'indigotine élevé), ce qui change la donne. Selon lui, 4 cuill. c. d'indigo peut teindre en ton moyen 500g de coton, lin ou soie et 1kg de laine. Selon Maiwa (cuve au thiox, pdf de 2018), on teindra 450 g de cellulosiques ou soie ou 900g de laine avec une cuve de 2 cuill. soupe d'indigo. Refrain: relativiser selon contexte, se rappeler qu'il utilise de l'indigo synthétique.

Certains commentaires ne semblent pas justes si je m'inspire de mon expérience en cuve 123 à la Michel Garcia, par exemple le principe de non stabilité à la lumière si on teint à froid (bien stable selon mes tests en 123) ou le fait que des retrempages peuvent décolorer à la longue (surtout le cas en hydrosulfite, j'imagine? puisqu'il est un décolorant...). Disons que ce sont des pistes.

Une cuve trop alcaline va non seulement abîmer les fibres protéiques, mais on risque de décharger l'indigo de la fibre lors d'un retrempage. En outre, on y produit des bleus plus gris (solution: post-bain acide qui ravive la couleur). Liles utilise des cuves de ph 8 à 9 (même si on monte parfois plus haut en pH pour amorcer une cuve-mère de départ ou de regénération).

Si la cuve-mère est à un pH de 11, pour l'amorce, ce pH se diluera dans le grand volume d'eau de la cuve finale; ainsi qu'avec le temps: la cuve absorbe du dioxyde de carbone de l'air et s'acidifie. Il suffit parfois d'attendre quelques heures. Il m'est arrivé de teindre des cotons solides dans une cuve trop basique, ce qui va calmer le jeu à la longue.

Il conviendra de tester chez moi car ceci est incompatible avec mes notes, datant d'un stage avec Michel Garcia: " Le pH doit être à 12 pour du coton, 10 pour de la soie, 9 pour de la laine. Du coton teint à un pH de 10 ne serait pas solide à la lumière, selon MG". Valeurs que l'on retrouve chez Maiwa, une autre source fiable.

J'en déduis que la différence se situe dans le type d'indigo: synthétique pour Liles, naturel pour les deux derniers.

 

Au passage je partage une image extraite des tutos pdf de Maiwa, un délice de simplicité. Ici: le minimum pour une cuve, soit l'indigo, le réducteur, la base. Cliquer sur l'image pour télécharger le pdf.

 

J'ai relu les passages de Liles sur la cuve au zinc, qui date du XVIIIè siècle (pure curiosité, je n'utiliserai ps); ainsi que la solution thiox (thiourée) comme réducteur pour la cuve rapide,qu'on produit généralement avec de l'hydrosulfite de soude. Il donne aussi les recettes du bleu de Prusse et du bleu saxon (acide sulfurique) - que je n'investiguerai pas à cause des produits et à cause du manque de stabilité de la couleur.

L'auteur insiste évidemment sur un lavage soigneux (laines, soies) et un décatissage du coton, faute de quoi l'indigo ne pénètre pas profondément dans la fibre et reste en surface.

Liles expose comment rabattre le ton d'un tissu trop foncé en indigo, solution qui permet aussi d'uniformiser une teinture un peu bringée: relancer une nouvelle cuve à base d'eau, de base et de réducteur, mais sans indigo. Quand elle est prête (après 15 minutes), y tremper le tissu quelques minutes. Une partie de l'indigo va dégorger.

Si on veut tout à fait éliminer la couleur, chauffer cette cuve d'enlevage à 70-80°C de 10 à 30 minutes. La combinaison de réducteur et de base est la composition des produits du commerce comme Rit Color Remover. Je me demande si on peut récupérer un dépôt d'indigo dans cette cuve ou si l'indigo est réellement détruit?

Si une cuve est trop chargée en indigo, Liles ne teint pas les laines à températures hautes (50°C) car ces dernières prendraient le ton trop vite et fonceraient trop vite (sans compter que ce type de prise d'indigo pousse au crocking par la suite). Il teint plutôt à 40-43°C, température à laquelle les cellulosiques prennent vite l'indigo. Il teint ensuite les laines dans la même cuve.

Pour réchauffer une cuve, il dépose le seau dans un bain marie d'eau bouillante. Ou il réchauffe une partie de liquide prelevée sur la cuve jusqu'à 60°C et la rajoute délicatement dans la cuve. Si le résultat


 

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